Sans raison, sauf peut-etre l’avortement de Claudia, souhaite par eux deux. Une abstinence complexe a gerer.
L’image qui me vient Quand j’envisage notre vie sexuelle de l’an dernier, c’est celle de l’ere glaciaire. Une hibernation forcee ou le desir est tue dans l’oeuf. Notre meteo de votre hiver 2010-2011 n’est nullement etrangere a une telle comparaison. Claudia et moi etionsdevenus aussi etrangers physiquement l’un a l’autre qu’un frere et une soeur ou deux bons copains. Comment c’est arrive ? J’ai fatigue et le stress du boulot n’etaient que des causes officielles. Je parlerais plutot d’un engourdissement mele de flemme, de routine et de trac.
En septembre, nous sommes partis une semaine en vacances en Italie du Sud.
Dans l’avion de la maison, je me souviens avoir regarde Claudia dormir sur mon epaule et compte mentalement que nous n’avions fait l’amour qu’une seule fois pendant le voyage, le premier matin a l’hotel. Un semi-fiasco interrompu par son telephone. Et puis plus rien pendant une semaine, malgre le cadre idyllique. Claudia se plaignait de douleurs dues a une nouvelle pilule contraceptive. Et maintenant nous etions deja de retour, pris avec les stress mutuels et des e-mails pro. J’ai fixe le visage si extri?mement qu’elle s’est reveillee, m’a d’abord souri, puis son expression est devenue interrogative, limite soupconneuse. Elle m’a demande a quoi je pensais. La question m’a bloque, elle a du sentir instinctivement que je songeais a notre chastete forcee. Elle s’est degagee du epaule et s’est recroquevillee pres du hublot Afin de se rendormir. Je lui ai passe la main au sein des cheveux mais elle a remue la tete comme 1 enfant qu’on derange. Scene banale, invisible concernant des autres voyageurs, mais qui m’a plonge dans une angoisse profonde. J’ai pense a une peinture romaine vue au musee de Naples pendant les vacances. Elle represente Orphee et Eurydice. Orphee est alle chercher Eurydice aux enfers, elle lui sera rendue a la condition qu’il ne se retourne jamais une seule fois vers elle en remontant. Orphee ne peut s’empecher d’la regarder et il la perd, a pas. L’expression paniquee d’Eurydice, effrayee et neanmoins soumise a toutes les puissances divines, reste une des plus bonnes trucs artistiques que j’ai vues. Rien de commun avec une histoire, si ce n’est la menace d’une separation definitive liee a Notre fond ou plutot a l’idee d’la mort.
Trois mois plus tot, Claudia s’est fera avorter. Nous avions pris la decision sans la moindre hesitation (je ne parle meme pas de scrupule). Avoir un enfant a ce moment-la etait bien simplement inenvisageable. Claudia venait de decrocher un boulot formidable dans un important cabinet d’audit financier. A 25 ans, elle voulait d’abord construire sa life technique. Elle n’est pas la seule dans ce cas et je pense que de nombreuses femmes de son age la comprendront. C’etait la premiere fois qu’elle subissait une IVG. Moi, j’avais deja vecu cela avec une ex et je faceflow pc savais que le traumatisme existait, que ce n’etait jamais quelque chose de simplement medical mais 1 geste tres lourd. Sur l’instant, j’ai achete que Claudia reagissait tres beaucoup. C’est aussi celle-ci qui m’a remonte le moral. Apres l’IVG, depuis eu une quinzaine de jours ou nous n’avons nullement fera l’amour pour des raisons medicales. J’imagine que c’est de la qu’est venu le blocage. Manque a cause de la mauvaise conscience mais plutot d’une tendresse paresseuse qui s’est installee. Je dois penser que si Claudia en a ete l’instigatrice, j’ai aussi ma part de responsabilite. Pour 1 homme, Realiser l’amour a une femme avec qui on partage le quotidien est votre travaux pas toujours evident. Plutot que d’usure, je parlerais de bienveillante apathie, d’envie de tendresse, de renvoi a la mere. Au bout d’un moment, le bonheur de se faire caliner l’emporte sur l’envie de baiser. Certains soirees et dimanches passes a analyser des DVD, a rire, a se rappeler des souvenirs ou a jouer au backgammon seront bien plus pernicieux qu’une excellente grosse engueulade. Difficile apres le cocooning de jouer les etalons ou meme de remettre le couvert en douceur. Notre boulot a bien sur joue son role. J’me souviens que Claudia passait des dimanches apres-midi entiers sur le iBook, assise concernant le lit en tailleur. Je voyais son dos, je somnolais, je me reveillais, elle n’avait nullement bouge, forcement a pianoter. Parfois 1 detail avait change: une tisane ou une cigarette fumant dans un cendrier. Je n’existais plus. Elle aurait tres bien pu etre seule. Ces dames ont une faculte de concentration tres superieure a la notre.
Apres une periode d’anesthesie, j’ai commence a ressentir de nouveau du desir. D’abord des poussees legerement brutales qui n’arrivaient jamais au bon moment. Souvent le matin, juste apres la douche, quand elle etait occupe i se preparer devant sa propre coiffeuse. Ou alors au restaurant ou au travail quand je l’avais au portable. Je ressentais une montee violente mais lorsque la situation s’y pretait (c’est-a-dire de plus et puis rarement), soit la fatigue m’empechait d’agir, soit Claudia avait ses regles, mal au crane, une conf’ call a preparer… Elle me disait non en riant au debut, puis fermement. Petit a petit, mon desir reste devenu sournois, obsessionnel. J’me sentais bourre d’envies, de fantasmes, et totalement coince. J’avais peur du rejet et, en meme temps, je ne pouvais m’empecher de le susciter. C’est incroyable tel une femme qui partage le meme lit pourra i?tre une etrangere. Si je buvais ou que je fumais un joint, je devenais parano. J’avais l’impression que Claudia me regardait bizarrement, j’imaginais qu’elle avait un amant. Je la harcelais. Elle se renfermait. Un soir ou j’etais devenu insupportable et ou je m’etais mis a me masturber contre elle, elle reste allee dormir au salon. La, j’ai compris qu’on risquait de ne pas repasser indemne de votre derive. J’ai installe une semaine de vacances et je suis parti seul, d’abord a Berlin, puis en Hongrie. J’habite sorti pas mal, j’ai vaguement drague une ou deux filles, sans l’envie d’aller plus loin. J’ai pris l’air et J’me suis senti mieux. Le soir de mon retour nous avons fait l’amour. J’avais defonce le sortilege en m’eloignant physiquement. Pour la premiere fois, avec presque un an, nous avons pris d’un ravissement ensemble. Depuis, les choses se seront arrangees. Le rythme de nos soirees sexe est espace mais le bonheur est au rendez-vous. Il ne faut jamais forcer la nature. J’attends nombre des vacances et, peut-etre, d’un projet d’enfant.